Conclusion

L’imagerie mentale visuelle est un processus cognitif dont les implications sont multiples et le fonctionnement complexe. L’aphantasie permet d’en apprendre plus sur cette faculté de par l’étude des conséquences et des causes de son absence. Nous avons ainsi vu les outils d’évaluation de l’imagerie mentale et de diagnostic de l’aphantasie qui représentent un point de départ primordial puisqu’ils permettent d’identifier ses caractéristiques intrinsèques. Nous avons pu aborder l’impact cognitif, physiologique, sensoriel et émotionnel de l’aphantasie et découvrir que ce trouble est corrélé à de très nombreuses fonctions cognitives et intervient dans des pathologies diverses. En effet, l’imagerie mentale est impliquée dans des maladies comme la schizophrénie ou Parkinson, où des hallucinations peuvent être amplifiées par une imagerie mentale particulièrement nette (Pearson, 2019), mais nous avons également appris que l’aphantasie est corrélée à l’autisme (Dance et al., 2021a). Les personnes aphantasiques présentent également des symptômes différents de syndrome de stress post-traumatique (Keogh et al., 2023). De manière plus générale, l’aphantasie est caractérisée par une altération de la mémoire épisodique qui a mené certains auteurs (Blomkvist, 2022) à revoir la définition de l’aphantasie pour en faire un trouble de la mémoire épisodique. Le guidage attentionnel (Monzel et al. 2023), la sensibilité sensorielle (Dance et al. 2021b) ou les émotions (Wicken et al., 2021; Dawes et al., 2022), sont également déficientes chez les personnes aphantasiques.

Devant la pluralité des thématiques entourant l’aphantasie, nous avons décidé de nous pencher sur le guidage attentionnel afin de construire notre propre expérience. Celle-ci a pour but d’approfondir l’importance de l’imagerie mentale visuelle dans la réalisation d’une tâche de guidage attentionnelle. Les résultats obtenus et analysés montrent que le fait de se représenter mentalement la cible est corrélé significativement à un score inférieur au test VVIQ. Cela suggère que les personnes aphantasiques ne créent pas d’amorce de la cible. Néanmoins, cela n’impacte pas la réalisation de la tâche ou le choix d’une stratégie particulière. Il se pourrait qu’en situation écologique l’aphantasie ne dégrade pas le guidage attentionnel dans le cas de stimuli imagé.

Cette expérience complète les résultats de Monzel et al. (2021, 2023) en déterminant que la stratégie n’a pas d’impact et en trouvant également que le temps de recherche est supérieur chez les aphantasiques, bien que ce ne soit pas significatif dans notre cas.

Finalement, il serait intéressant de reproduire cette expérience avec un échantillon plus grand, notamment pour le groupe aphantasique. Il serait également intéressant d’approfondir les recherches sur les différences de stratégies chez les personnes aphantasiques que ce soit de manière introspective en questionnant directement les personnes concernées sur leurs méthodes ou en utilisant des techniques d’imagerie cérébrale comme des IRMs d’activation et des potentiels évoqués. Ces méthodes, très largement minoritaires dans l’étude de l’aphantasie, pourraient mettre en relief l’implication d’une absence d’imagerie sur les processus neuronaux. L’étude de ces processus permettrait notamment la mise en évidence de processus inconscients pouvant apporter des informations complémentaires sur les stratégies de compensation mises en place par les personnes aphantasiques.